La mauvaise humeur

Ce matin je me suis levée du mauvais pied. J’ai pensé à cette expression et maugréé son absurdité. Pff… Se lever du pied gauche, du pied droit: qu’est-ce que cela peut faire ? J’ai dû me lever, et c’est déjà une mauvaise nouvelle en soi.

Pas envie. Pas envie de m’habiller. Pas envie de déjeuner et de compter mes calories dès le matin. Pas envie d’aller travailler. Je ne sais pas pourquoi, mais je n’ai pas envie. Je l’ai décidé quand j’ai posé, rebelle, les deux pieds hors du lit : ce n’est pas ma journée.

Problème : je n’ai aucune excuse. Il ne s’est rien passé. Rien qui justifie mon visage crispé ni le ton brusque de ma voix. Rien à dire, rien à redire. Mes enfants se réveillent calmement et me sourient dès qu’ils me voient, mon mari est déjà en train de préparer le petit déjeuner, il ne pleut pas : même l’Angleterre ne me soutient pas !

Mais je ne sais pas, c’est comme ça, je suis de mauvaise humeur… Et tout, tout va me servir d’excuse.

J’incarne à moi toute seule la Mauvaise Foi. Je suis intransigeante, injuste et insupportable. Un vêtement qui traîne ? Une porte qui grince ? Je trouve l’aiguille dans la botte de foin et pique machiavélique la bonne humeur de chacun. Je gronde mon fils pour ce qu’il n’a pas fait la veille, j’accuse mes collègues de ce qu’ils ne feront pas aujourd’hui. Je blâme mes voisins, le Maire et tout le pays. Je suis de mauvaise humeur, d’une mauvaise humeur à faire trembler de peur les plus douces et généreuses grands-mères bénévoles du magasin de charité du coin. Même mon chat se méfie de moi.

Je descends l’escalier en râlant. Il fait trop froid, le sol est trop chaud, il est trop tard, j’aurais dû me lever plus tôt mais je ne le voulais pas. Alors je suis en retard. Voilà une bonne excuse pour me plaindre, non ? Et puis le beurre est trop mou, le pain est trop cuit. Les enfants sourient trop, mon mari trop patient. La musique m’irrite, le silence m’agace. Non, non et non, rien ne va. Faudrait-il en plus que je ne dise rien ?

Mes enfants me connaissent. Ils se taisent. On me sert mon café. Il est bien chaud, il est bien fort. Ça va déjà mieux. Je souris.

« Alors, vous avez bien dormi ? »

4 réflexions au sujet de « La mauvaise humeur »

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